Prise de parole 29.05.2024

mai 29, 2024

Je vous invite à suivre la minorité de la commission.
Le rapporteur et la porte-parole de la minorité l’ont déjà souligné: ce n’est pas la première fois que nous discutons du thème de l’accès aux hautes écoles pédagogiques pour les titulaires d’une maturité professionnelle. Nous l’avons fait de manière approfondie lors de la session d’automne, à l’occasion de l’examen d’une motion de la Commission de la science, de l’éducation et de la culture du Conseil national, qui avait un objet identique à celui que nous examinons, et qui avait été rejetée par notre conseil, par 21 voix contre 19, suivant en cela la majorité de la commission.
Permettez-moi de revenir très brièvement sur ces débats. Un des arguments à l’appui du rejet de la motion était en effet, outre le respect des compétences des cantons – je ne reviendrai pas non plus sur les arguments matériels – le rapport en cours d’élaboration par le Conseil fédéral en collaboration avec les cantons en réponse au postulat 22.4267, « Admission des titulaires d’une maturité professionnelle à la formation d’enseignant ou enseignante primaire ». Les cantons eux-mêmes nous avaient adressé une lettre pour nous demander de rejeter la motion et d’attendre le rapport, indiquant en particulier ce qu’ils nous avaient aussi dit lors de l’audition, à savoir leur participation active et leur intérêt pour les travaux traités dans le rapport.
Aujourd’hui – cela a été dit -, ce rapport n’est pas encore disponible, mais la présentation des travaux reçus en commission montre que les solutions en discussion semblent prometteuses.
J’en viens, avec cette mise en contexte, à l’initiative du canton de Saint-Gall, dont nous débattons ce matin. Nous en sommes – cela a été souligné – à la première étape de l’examen et devons répondre à la question: y a-t-il un besoin d’agir, un « Handlungsbedarf »? C’est la seule question à ce stade à laquelle nous devons répondre. La question à laquelle nous avons répondu l’automne dernier en traitant la motion n’était pas la même: nous devions en effet dire oui ou non à la modification légale proposée.
J’ai soutenu moi-même, à l’automne passé, le rejet de la motion, car elle amenait – je l’ai dit – une solution qui se limitait à la seule question de l’accès à la formation et ne respectait pas les compétences des cantons. Elle était trop restrictive, ne permettant pas d’examiner d’autres solutions possibles. Il était indispensable, à mon sens, d’attendre le rapport et de disposer de l’analyse approfondie menée conjointement par la Confédération et les cantons, pour mieux cibler les solutions qui respectent le fédéralisme et les compétences, d’une part, de la Confédération et, d’autre part, des cantons.
Aujourd’hui – comme je vous l’ai dit -, nous n’avons pas encore ce rapport, ce que je regrette. Mais le fait de soutenir la proposition de la minorité et de donner suite ce matin à l’initiative du canton de Saint-Gall nous permet d’attendre le rapport pour prendre des décisions et faire des propositions qui peuvent aller bien au-delà de celles qui sont faites dans l’initiative. Nous serons maîtres du sort de l’initiative, et pourrons même décider de ne pas adopter le projet, dans une deuxième phase, si nécessaire. Mais dire oui à cette première étape signifie avant tout reconnaître qu’il y a un « Handlungsbedarf »: cela permet de souligner l’importance du travail mené entre la Confédération et les cantons dans le cadre du rapport, afin de trouver des solutions. Je suis – j’en suis certaine, comme vous tous – attachée à la perméabilité du système de formation qui constitue un principe constitutionnel important de l’espace suisse de la formation.
Donner suite à cette première étape de l’initiative revient donc à exprimer la volonté du Parlement d’assurer une meilleure perméabilité entre maturité professionnelle et formation des enseignants, mais également d’assurer le succès des études. Permettez-moi une remarque: je ne minimise pas les différences existant aujourd’hui entre les deux types de formation. Je ne les minimise pas, notamment parce que la formation en haute école pédagogique (HEP) est orientée vers la pratique et doit pouvoir tenir pour acquises les branches dites de culture générale; elle doit préparer les futurs enseignantes et enseignants à leur métier et se focalise donc sur la pédagogie et la didactique de branche.
J’ai contribué, comme conseillère d’Etat et présidente de la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de l’instruction publique (CDIP), à mettre en place le système. Je reste convaincue de l’importance de la décision de la tertiarisation de la formation des enseignants, contrairement à l’avis qui a été exprimé. Je me permets de souligner qu’aujourd’hui encore, un enseignant d’école primaire est formé en trois ans, la formation en quatre ans et demi ou cinq ans étant réservée à la pédagogie spécialisée – donc en fait, aux enseignants qui, auparavant aussi, avaient besoin d’une formation universitaire.
Je l’ai dit, la Confédération et les cantons travaillent ensemble sur ces différences et les perspectives sont positives. Le terme « ensemble » me paraît extrêmement important: effectivement, la Confédération et les cantons doivent respecter leurs compétences et combler le « Handlungsbedarf » en élaborant une solution commune.
Pourquoi cela est-il tellement important? C’est important parce que les titulaires d’une maturité professionnelle ont leur place dans une haute école pédagogique et, plus tard, dans une école, comme enseignants ou enseignantes. Ces futurs enseignants et enseignantes au bénéfice d’une expérience professionnelle et avec un profil différent des étudiants ayant fait le cursus ordinaire – disons-le comme cela – sont les bienvenus dans les écoles. Le système scolaire bénéficie de leurs apports.
Donnons à la Confédération et aux cantons le signal montrant que nous saluons les travaux en cours et que nous sommes prêts à suivre leurs conclusions.
Je vous invite dès lors à soutenir la proposition de minorité et à donner suite à l’initiative dans cette première étape.